Elles sont jeunes, elles sont brillantes et elles ont tout pour réussir. Cela ne les a pas empêchées de sombrer dans l'enfer des troubles alimentaires sans même que rien n'y paraisse aux yeux de leurs proches.Il faut dire que l'un des «effets collatéraux» des troubles comme l'anorexie et la boulimie est d'amener ceux et celles qui en souffrent à s'isoler. Manger est un geste social, font remarquer Annie et Marie-Ève, toutes deux âgées de 28 ans. Alors, quand ce geste n'a plus rien de naturel, on s'éloigne des regards. C'est autour d'une table de cuisine, un lieu hautement dangereux (!) pour elles à une époque pas très lointaine, qu'elles racontent leur histoire, avec l'espoir qu'elle incitera d'autres personnes comme elles à aller chercher de l'aide. Car cette table, qui est celle de la Maison L'Éclaircie, est devenue pour elles un refuge. «Je pense qu'il est très difficile de se sortir d'un trouble alimentaire sans aide», plaide la blonde Annie. Bien proportionnée, jolie comme tout, la jeune fille a fait l'admiration de ses amies lorsqu'elle est passée de 150 à 110 livres sur la balance. Mais ce que les copines prenaient pour une volonté de fer était en fait une maladie de l'esprit, le fruit d'une véritable obsession et d'une grande souffrance morale. Vomissements à l'occasion («pas trop, je savais que c'était dangereux») et surtout laxatifs qui lui donnaient des maux de ventre et des diarrhées terribles l'ont accompagnée pendant cinq ans. Les diètes strictes étaient suivies d'intenses crises de boulimie où elle engouffrait rapidement des quantités phénoménales de nourriture, qu'elle forçait ensuite son corps à rejeter dans les toilettes. «C'est dur à croire après, mais en état de boulimie, t'es plus vraiment présente, t'as plus d'émotions.» Il aura fallu quatre ans pour qu'Annie admette qu'elle avait un problème et trouve le courage d'appeler au secours. La peur d'être jugée «On a honte, c'est gênant, on a peur d'être étiquetée», commente la brune Marie-Ève en se rappelant le jour où elle a frappé à la porte de L'Éclaircie. Une fois cette étape passée, elle dit avoir trouvé un lieu d'accueil chaleureux et sans jugement, qui est maintenant son tremplin vers la guérison. Le visage émacié de celle qui a perdu beaucoup trop de poids, Marie-Ève a vécu une descente aux enfers en accéléré. Tout s'est joué en l'espace de quatre mois, l'été dernier. Alors que tout foutait le camp dans sa vie, elle a littéralement senti le besoin «de disparaître». Déjà en arrêt de travail pour cause de dépression, elle s'est aussi mise en arrêt de manger. «C'était la seule chose que je pouvais contrôler. Je me disais, hier, j'ai réussi à faire ma journée avec un Ficello et une pomme, aujourd'hui ce sera juste une pomme», raconte celle dont le poids est passé de 115 à 90 livres, et dont même les muscles et les os en ont été affectés. Ses menstruations ont aussi cessé. Son regard sur elle était complètement faussé. Alors qu'elle flottait dans ses vêtements, elle se trouvait grosse. Encore très fragile, Marie-Ève a recommencé à manger trois repas par jour, avec le soutien d'une nutritionniste. Mais elle est loin d'être guérie et appréhende le temps des Fêtes et les repas pris en groupe. Tout comme Annie, la jeune femme n'a jamais parlé de sa situation à sa famille. Sa perte rapide de poids est passée sur le dos de la dépression. En chiffres > Actuellement, environ 3 % des femmes sont affectées par un trouble de l'alimentation sévère. Au moins 10 % des Québécoises de 13 à 30 ans souffrent d'un trouble de l'alimentation important. > De 0,5 % à 4 % des femmes souffriront d'anorexie au cours de leur vie, et de 1 % à 4 % souffriront de boulimie. > De 5 % à 10 % des cas d'anorexie et de 10 % à 15 % des cas de boulimie sont observés chez les hommes et les garçons. Informations Située à Sainte-Foy, la Maison L'Éclaircie offre des services d'écoute téléphonique, des groupes de soutien et de l'accompagnement individuel aux personnes anorexiques et boulimiques, de même qu'à leurs proches. Les services sont gratuits. Pour information : 418 650-1076 ouwww.maisoneclaircie.qc.ca |
mercredi 22 décembre 2010
Anorexie et boulimie: quand manger devient un enfer...
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