SOURCE REUTERS
La Corée du Sud s'apprêtait, samedi, à déclencher comme prévu des manoeuvres militaires avec des munitions réelles malgré la menace de nouveaux bombardements brandie par la Corée du Nord. Seule alliée du régime nord-coréen, la Chine a invité les deux parties à la retenue, tandis que Bill Richardson, gouverneur du Nouveau-Mexique et émissaire officieux des États-Unis, a qualifié la péninsule coréenne de "poudrière". Les observateurs doutent cependant que la Corée du Nord mette sa menace à exécution.
Les manoeuvres militaires sud-coréennes doivent durer jusqu'à mardi au large de l'île de Yeonpyeong, bombardée le 23 novembre par la Corée du Nord. Enveloppée par le brouillard et balayée par le vent samedi, cette île située à environ 80 kilomètres de la côte est habituellement calme. Elle abrite une petite communauté de pêcheurs organisant des excursions pour les touristes. Elle se trouve également à proximité de la frontière maritime entre les deux Corées dont le tracé dessiné à l'issue de la guerre de 1950-1953 est contesté par le régime de Pyongyang.
La plupart de ses 1.600 habitants, qui vivent aux côtés d'un millier de militaires, s'inquiètent de possibles nouveaux tirs d'artillerie nord-coréens. Beaucoup ont décidé de braver la mer souvent houleuse dans la région et d'effectuer les cinq heures de traversée leur permettant de se réfugier sur le continent. "Je suis venu hier vérifier le chauffage dans la maison et le bateau qui doit nous remmener est retardé", a déclaré Yoon Jing-young, un habitant. "Nous craignons que cela soit en raison des manoeuvres qui débutent aujourd'hui."
Menace de conflit nucléaire
La Corée du Nord a prévenu, vendredi, que sa riposte à des manoeuvres sud-coréennes dans le secteur serait plus forte que le bombardement du mois dernier, au cours duquel ses 170 obus d'artillerie ont fait quatre morts sur l'île sud-coréenne. La Corée du Sud avait alors répliqué par 80 obus. Les médias officiels nord-coréens ont relayé, samedi, une nouvelle mise en garde du pouvoir à l'adresse des Sud-Coréens en raison de leur coopération, notamment militaire, avec les États-Unis et de leur détermination à mener à bien leurs manoeuvres. La Corée du Nord a ainsi brandi la menace d'un conflit nucléaire. "Les forces conservatrices du Sud entreprennent une initiative suicidaire, qui revient à creuser leur propre tombe, en se liguant avec des éléments extérieurs pour tenter de nuire à des compatriotes", écrit la publication officielle du gouvernement, Minju Joson, dans un éditorial.
La Chine a renouvelé samedi son appel à la retenue en soulignant qu'un nouvel affrontement entre les deux Corées pourrait déstabiliser la région entière. Fidèle à sa prudence, elle n'a, en revanche, désigné nommément aucun des deux pays. "La situation actuelle dans la péninsule coréenne est particulièrement complexe et sensible et la Chine est hautement préoccupée", a déclaré Jiang Yu, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. "La Chine s'oppose résolument, sans la moindre ambiguïté, à toute initiative pouvant conduire à une dégradation de la situation et à une escalade et pouvant détruire la paix et la stabilité régionales", a-t-elle ajouté.
"Mauvais calcul"
La Russie a invité la Corée du Sud à renoncer à ses manoeuvres. Elle a convoqué les ambassadeurs sud-coréen et américain pour leur exprimer son "inquiétude extrême". Gouverneur démocrate du Nouveau-Mexique, Bill Richardson se trouve, pour sa part, à Pyongyang pour ce qui est officiellement présenté comme une mission privée destinée à apaiser les tensions sur la péninsule. Dans une interview à CNN, il a invité la Corée du Nord à laisser sa voisine du Sud mener à bien ses manoeuvres militaires. "J'ai le sentiment que les Nord-Coréens essaient de trouver des moyens pour que la situation se tasse", a dit cet ancien ambassadeur américain aux Nations unies, qui a rencontré un responsable du régime de Pyongyang. Cependant, il perçoit aussi "d'énormes possibilités de mauvais calcul". "En ce moment précis, c'est une poudrière. Ce que nous devons faire ne se limite pas à faire en sorte que les choses se tassent, mais aussi de trouver les mesures qui pourraient être prises par les Nord-Coréens, comme peut-être d'autoriser l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique, NDLR) à venir inspecter son arsenal nucléaire", a-t-il dit. "Il faut que les choses se calment. Pas de riposte."
Le département d'État américain s'est dit "absolument préoccupé par la trajectoire actuelle", tout en insistant sur la responsabilité de la Corée du Nord. Le régime nord-coréen réclame une reprise sans condition des pourparlers à six au sujet de son programme nucléaire avec la Corée du Sud, les États-Unis, la Chine, la Russie et le Japon. Washington et Séoul s'y opposent afin de ne pas récompenser Pyongyang après des actes hostiles. Pour les observateurs, la Corée du Nord agite la menace d'un conflit nucléaire afin d'obtenir davantage de concessions en cas de reprise des pourparlers à six. Les tensions actuelles serviraient aussi à affermir la position de Kim Jong-un, fils cadet du dirigeant nord-coréen Kim Jong-il qui semble promis à la succession de son père.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire